top of page

J'ai pas envie

Mon week-end de formation à l’académie d’écriture Anaël Verdier de Bordeaux a été, cette fois encore, intense, riche et déstabilisant.

Diane de Man

Ce blog est un des quatre projets de cette première année. Et depuis la fin du mois d’avril je l’ai un peu délaissé, voire même carrément abandonné alors que jusqu’à présent c’était le dossier sur lequel j’avançais le plus régulièrement et avec le moins de résistance.

Bizarrement, la tendance s’est complètement inversée le rendant totalement rédhibitoire pour moi. Je l’ignore comme une chose dont je ne veux plus entendre parler.


Dimanche, Anaël m’a demandé « où en est-tu du blog? » et un « nul part, j’ai pas envie. » est sorti. Il me brûle encore la langue. Mais tant mieux.


Ça pique un peu lorsqu’avec bienveillance mais fermeté, il te rétorque que l’envie n’a rien à voir avec tes projets. Que lorsque je soigne mes patients, envie ou pas, je le fais quand même et que de m’engager dans une formation d’auteur professionnalisante, ma part de responsabilité inhérente n’est pas optionnelle.


Il m’a alors suggéré d’écrire un billet « J ‘ai pas envie » et de voir ce qu'il en sortirait. Mon article sur le courage était né du même procédé, me poussant ainsi à me plonger au coeur de ma résistance, pour la comprendre et l’apprivoiser.


Depuis ce matin très tôt, mon esprit s’est égaré, réfléchissant à tout ce qui s’était dit et à ce que cela avait fait germer en moi.


Rapidement j'ai compris qu’un lien fort existait avec l’ouverture de ma page Facebook. Avec ma prise de contact plus réelle et immédiate avec les autres. Ceux qui me regardent, me lisent. Ces fameux lecteurs que l’on espère et craint tout autant, dans un paradoxe d’une puissance extraordinaire.


J’ai choisi un nom de plume pour me cacher, en toute honnêteté. Ensuite je me suis rendu compte que cette part de moi qui voulait écrire existait bien à part entière, et que c’était Diane, qui en était l’essence. J’aime ce prénom, la signification qu’il a pour moi et l’énergie qu’il insuffle dans mon écriture. Je n’ai pas vraiment été consciente de ce que cela me ferait malgré tout, qu’on la découvre, Elle. Car je croyais que c’était Diane, qui me protégeait.


Et grâce, ou à cause de Facebook, elle s’est retrouvée en première ligne.


Initialement, j’avais sélectionné les lecteurs du blog, consciente et soulagée du peu de chances qu’il soit lu autrement. Un choix qui me donnait le sentiment d’être en sécurité, sans penser à après. Avec Facebook, cette liste de lecteurs s’est amplifiée sans que je puisse maîtriser vers qui et cela m’a fermée. Totalement.


Notre éducation et la société nous conditionnent. Nous portons une fois « grand » des costumes d’adultes, au sens propre comme figuré, qui bien souvent se veulent formatés, codés, acceptés comme acceptables. Et nos censeurs internes sont fort développés. Bien que nous ayons un job, avec parfois d’immenses responsabilités, des factures à payer, des enfants à élever, j’aime à penser que nous restons malgré tout ceux que nous avons toujours été. Plus sages, certes, plus lisses peut-être, mais je l’espère toujours aussi vivants, spontanés et émerveillés.

Demeurent en moi, l’enfant, l’ado, la jeune adulte, auxquelles se sont ajoutées la femme, la mère et depuis Diane, et d’autres encore, inattendues, chipies et surprenantes. D'autres que j’ignorais ( là aussi dans tous les sens du terme), ne cherchant pas à les découvrir et/ou les réduisant au silence. Mais comment réussir à les aimer toutes? Comment les laisser exister chacune pour finalement n’être que moi, multiple mais une et entière?


Dimanche soir j’ai eu une discussion forte intéressante avec un ami. Il m’a partagé son ressenti autour de la sévérité que j’avais à mon encontre, de ma difficulté à m’accepter telle que j’étais, gommant tout ce qui était moi pour être telle que je pensais devoir être, et de ma véritable crainte du regard de l’autre. Sans renier tout cela et me sachant en chemin, je me suis dit que c’était relativement surprenant de rêver en même temps d’être auteur. Pour moi cela inclut implicitement de partager une partie de ce que l’on est, de ce qui nous habite, avec l’intime espoir que cela soit suffisamment bon, je vais plutôt utiliser utile, pour apporter quelque chose à quelqu’un..


Depuis toujours, je lutte. Pour tout, tout le temps. Et se mêle en moi un curieux mélange de sentiments…Celui déjà que la lutte est inévitable, que la pire route est la meilleure, que la réussite est obligatoire, sans demander d’aide bien évidemment, pour ne pas déranger (le mériterais-je de toute façon?), mais aussi pour être honnête parce que Maîtrise est mon deuxième prénom…et Excellence le troisième. Ce soir, je comprends que c’est un choix, et non une fatalité.


Je me souffle dans l’oreillette que bizarrement je ne suis pas gênée d’écrire tout cela, alors même que je sais que dans peu de temps je vais appuyer sur publier.

Il s’est passé quelque chose ces deux derniers jours et c’est bien. L’inconfort est grand mais la promesse me parait infinie.


Je vais vous partager une petite anecdote. Mon blog a deux noms. Face Nord et Au feel des mots.

Au feel des mots est celui que je lui ai choisi. Face Nord est celui que mon amie de promo, Virginie, m’a donné. Elle a très rapidement perçu, avec gentillesse et humour, que je n’empruntais jamais la face sud. On en a souvent rigolé, moi j'ai parfois pleuré…Mais ce week end j’ai, à plusieurs reprises, cheminé au soleil sur ma montagne.


Plus je trace ma route au gré de ce post et plus cela me conduit à l’autonomie dont je vous parlais dans mon précédent article. Chaque jour, j’aide des gens à conserver leur autonomie, et c’est bien avec mon concours que cela se passe. Je ne remets donc aucunement cette vision que j’ai, où l’autre n’est pas forcément absent. Mais grâce à ce week end, je viens de saisir une couche supplémentaire qui me semble essentielle à ma compréhension mais surtout à mon intégration de ce mot prédominant dans mon univers d’auteure et en toute intimité, si essentiel à ma vie… Et j’aimerais vraiment vous la partager.


Cela a été si claire, si limpide pour moi, que j’espère réussir à vous le retranscrire.


J’ai la chance de connaître une personne qui vit pleinement et d’une manière très puissante son autonomie. Elle connait ses forces et les exploite, accepte ses faiblesses et trouve les ressources pour les renforcer, elle sait ce qu’elle veut et ne veut pas et s’autorise à les assumer l’un comme l’autre.

Le regard bienveillant qu’elle porte sur elle lui permet d’exister sans crainte de l’autre. Elle ne cherche aucune validation extérieure, reconnait ses besoins, les comble avec aide si nécessaire.

Et ce qui est le plus beau, c’est que ce même regard, elle l’offre aux autres.


La première fois que je l’ai rencontrée, ce regard inconditionnel a été comme le plus puissant des onguents de magicien sur mes blessures. Comme une réconciliation entre cette partie de moi qui jugeait si sévèrement l’autre pourtant si belle dans son imparfaite humanité. Et parce que l’on pouvait me regarder toute entière comme ça, malgré cela j’irais même jusqu’à dire, telle que j’étais tout simplement, moi aussi je le pouvais.


Quel merveilleux cadeau.

Il m’aura fallu du temps, pour saisir cette chance.


Je ne crois pas que cela soit magique et que je vais changer en un claquement de doigt. Quasi une année aura été nécessaire pour le comprendre. Mais je sens pointer cette mutation, au fond de moi.

Certainement dois-je aussi accepter que cela n’est pas plus compliqué, qu’il n’y a pas encore autre chose de caché, un truc magique à découvrir.


Se connaître, s’aimer juste pour ce que l’on est, avec ce que l’on est, sans s’en excuser, sans se justifier. Être libre et autonome, c’est ça. Nouer avec soi la plus belle des relations, se faire l’amour chaque jour pour faire partie de ce Tout qu’est l’univers où chacun a sa place.


Ce qui est riche aussi, c’est que cela me permets de voir tout ceux qui me regardaient déjà un peu comme ça, avant, et que je ne voyais pas.


Je n'ai pu m'empêcher de faire le parallèle avec l’apprentissage de l’écriture qui se révèle être une merveilleuse école d'autonomie. Car tous, nous sommes encouragés par nos coachs, nos mentors, nos collègues et amis à débusquer, développer et assumer notre voix, notre singularité, à la respecter et la valoriser. Merci à Virginie et Anaël pour cela, pour accompagner chaque mois l’auteure et la femme sur ce chemin.


Je comprends que ce n’était pas l’envie qui m’avait quittée, loin de là, tant j’ai pris de plaisir à écrire cet article. Mais juste que l’illégitimité, le sentiment d’incompétence et tous leurs petits démons, en d’autres termes la peur, avaient franchit la porte que j’avais laissé un peu trop entrouverte.

bottom of page